Entre le décès de sa maman et une “belle-mère” méchante, Eric est triste, perdu et surtout très malheureux, car personne ne le comprend vraiment il n’a personne à qui se confier mis à part sa sœur Anne..
Sa maman est restée au lit très très longtemps, dans sa chambre sombre qui sentait mauvais. Puis, elle est partie, et son lit est resté vide. Elle est allée au ciel, lui a chuchoté Anne en le serrant dans ses bras. Elle a de la chance, sa maman. Lui aussi, il aimerait monter dans un avion à hélices pour aller jouer au trampoline sur les gros nuages blancs. mais il s’est trompé. Son papa pleure, Anne pleure, Irène, l’amie de sa maman qui est venue pour s’occuper d’eux, pleure aussi. Alors Eric pleure. C’est impressionnant de voir les grands pleurer. Sauf son papa : lui, c’est plutôt marrant, parce qu’il lui a souvent répété que ce sont les mauviettes qui pleurent. Il a le nez rouge, les yeux gonflés : c’est ça, une tête de mauviette? Éric n’a pas osé lui poser la question.
Maintenant, cela fait des semaines que sa maman est dans le ciel. Elle n’en a pas marre de voler toute seule, là-haut? Elle n’a pas envie de redescendre sur Terre pour venir l’embrasser? Chaque soir, il l’attend. C’était leur moment à eux deux, où ils se murmuraient leurs secrets, se chuchotaient leur journée, et où elle lui lisait une histoire. Quand Irène lit un album, elle ne prend pas la voix de la sorcière ni celle des nains. Elle dit tout de la même manière, c’est plat. Et elle se dépêche pour avoir plus vite fini, même si elle ne veut pas le montrer. Parfois même, elle saute une page et elle croit qu’il ne remarque rien. Eric se relève toujours après qu’elle est partie, pour ouvrir la fenêtre. Si sa maman a décidé de revenir la nuit pour un gros câlin avec lui, elle doit pouvoir atterrir dans sa chambre.
Eric n’attend pas que la nuit. Il attend le matin, le midi, le soir. Au petit-déjeuner, il espère la retrouver, car elle seule connaît la bonne dose d’Ovomaltine dans son lait. Quand il rentre de l’école, il court sur la route pour la retrouver plus vite et ne marche que lorsqu’il est trop essoufflé. Mais c’est Irène qui lui ouvre la porte et qui lui ordonne d’enlever ses chaussures pour ne pas salir l’intérieur. Quand papa rentre du bureau, il se dit que maman l’a peut-être rejoint et qu’ils reviennent à deux, mais il a beau chercher des yeux derrière papa, il n’y voit jamais personne. Quand il demande à Irène : “Elle revient quand, maman?”, elle lui fait “Chuuuut!” avec de gros yeux. “Ton père va t’entendre.”
Ce soir, Anne est venue dans son lit. Elle a froid aux pieds et elle les lui colle sur ses cuisses pour les réchauffer.
– Pourquoi ta fenêtre est ouverte?
– Pour maman, quand elle descendra du ciel. Tu sais quand elle va rentrer de son
voyage? Elle te l’a dit, à toi?
Anne soupire avant de répondre :
– Mais Eric, tu n’as pas bien compris. Elle ne va pas revenir. On te l’a dit, elle est
morte. Et quand on est mort, c’est pour toujours. ça veut dire que jamais, jamais on ne la reverra, et c’est très triste.
Anne a une drôle de voix quand elle lui parle.
– Mais tu avais dit qu’elle était au ciel?
Alors, elle lui raconte ce que la sœur Angèle a expliqué en classe quand leur maman est morte. Nous, on est malheureux parce que maman nous manque, mais elle, elle a de la chance, car elle est avec Jésus, dans un endroit très beau, où tout le monde est gentil, où on n’a jamais ni trop chaud ni trop froid, où tout est beau.
– On peut manger autant de glace que l’on veut?
– Je ne sais pas, sœur Angèle ne l’a pas dit.
– Tu crois que maman est contente, là-bas? Même sans nous?
– Oui, parce qu’elle nous voit. C’est pour ca que sœur Angèle a dit qu’on devait être
sages, parce que maman nous surveille et que ça lui fait plaisir et que ça lui fait plaisir qu’on soit gentils.
– Et on ne la reverra jamais?
– Oui, quand on sera vieux et qu’on sera morts, on la retrouvera. Et on restera
ensemble pour toujours.
– Et Irène aussi, elle sera là?
– Non, Eric, non. Irène n’ira pas au ciel.
Contributrice: Chiara Dal Monego